Chaleur'eux Cambodge, 17.03.2019
- Clem'trotter
- 17 mars 2019
- 9 min de lecture
Assez entendu parler du trio, Laos-Vietnam-Cambodge (anciennement Indochine française) pour cette fois ne pas mettre un pied dans l’un de ces trois majeurs de l’Asie du Sud-Est. Sur le retour d’une escale professionnelle en Océanie, j’apprends qu’un couple d’ami se trouve au Cambodge pour quelques jours… L’opportunité est là, avant de revenir en France, je prends donc 2 semaines pour visiter le plus petit pays des trois… et à 3. Atterrissage à Phnom Penh, c’est parti pour une nouvelle aventure, totalement improvisée, au goût asiatique.

Sans surprises, c’est la chaleur qui m’accueille à la sortie de l’aéroport. Elle m’enlace, m’étouffe dans ses grands bras secs et poussiéreux. Les premiers kilomètres défilent depuis l’arrière de mon tuk-tuk, les sourires se succèdent, parfois ils sont 5 sur un même scooter. Malheureusement, la ville souffre des maux de l’urbanisme asiatique, à savoir la pollution, la sur-fréquentation et une architecture anarchique.
Le soir je retrouve Quentin et Pamela, mes amis Belges en tour d’Asie pendant 5 mois. Après la Birmanie, le Vietnam, ils découvrent le Cambodge. Nous célébrons nos retrouvailles sur un stand de street food, immersion garantie. Le lendemain, visite des quelques incontournables de la capitale, dont le tristement célèbre Tuol Sleng connu sous le nom de S-21. Il traite du génocide cambodgien, commis entre 1975 et 1979 dans le Kampuchéa démocratique des Khmers Rouges. Le S-21 est la plus connue des 196 anciennes prisons que la dictature avait disséminées à travers le Cambodge. Environ 18 000 personnes y ont été détenues, torturés et exécutés (on retrouvera 7 survivants) pour des raisons souvent imaginaires. S’y trouvaient des civils, des étudiants, des intellectuels dont le seul port de lunette les rendaient emprisonables ! Je passe sur les traitements subis et les conditions d’incarcération durant ces 4 années, une horreur dont seul l’homme en a le secret ! A la tête de cette folie, un homme, Pol Pot, qui reconnaîtra « modestement » avoir commis quelques erreurs. Erreurs qui ont coûté la vie à environ 1,7 millions de personnes, soit plus de 20% de la population de l’époque. Ici, on assimile Pol Pot à Hitler, et Tuol Sleng au Auschwitz cambodgien. Ce qui m’étonne le plus, au-delà du couple dévastateur que forme l’homme avec le pouvoir, c’est l’espace temporel de ce génocide, qui a lieu à peine 30 ans après la folie Hitlérienne, et il y a tout juste 40 ans. On cesse de répéter qu’il faut se souvenir pour ne pas revivre de telles tragédies, alors comment est il possible qu’on ne s’en sorte pas. L’homme est il définitivement mauvais ? Aveuglé à ce point ? L’avantage avec cette « ambition » débordante, c’est que l’espèce humaine disparaitra bien avant qu’une commette ne règle tout cela ! Pas facile de commencer la visite d’un pays par ce qu’il a connu de pire, mais tellement important pour mieux comprendre où l’on se trouve.

Dans l’après-midi, nous arpentons les rues et découvrons le Palais Royal. Le site est architecturalement imposant, mais il est dérangeant de voir que le seul endroit propre et verdoyant de la ville, c’est celui du pouvoir. On a que faire de ce qui se trouve en dehors des remparts ! Le Mékong qui traverse la ville ne suffit pas à nous donner envie d’en voir plus de cette ville que nous trouvons peu attrayante. Seule la sympathie et l’accessibilité des Cambodgiens nous donnent du baume au cœur.

Direction le nord-est, la région du Mondolkiri, que l’on espère verdoyante, et pourvu de sites d’intérêts rafraichissant. Les routes au Cambodge sont bonnes, en même temps c’est tout droit et plat (peu de relief ici), et la conduite une des plus tranquilles que j’ai pu vivre en Asie. La région du Mondolkiri est tout aussi tranquille, voir un peu trop. Depuis notre hutte, on a le sentiment d’être au milieu de la brousse africaine, tout est jauni par le soleil, l’eau ne coule plus et la chaleur est écrasante. On comprend pourquoi les cambodgiens aiment tant « chiler » dans leur hamac, c’est qu’il est difficile de faire autre chose. D’ailleurs, nous pensons que c’est eux qui ont inventé le hamac et de ce fait, le mot « chiler ». Sur une journée, nous partons découvrir les « charmes » de la campagne environnante, avec un tuk-tuk et son driver. Cascades asséchées, végétaux à l’asphyxie, et détritus débordants, nous ne boudons pas notre plaisir ! Les seuls endroits fréquentés sont des sites aménagés avec des soit disant « vue panoramique » et à la décoration plus que kitsch. Heureusement sur le chemin nous croisons, plus ou moins jeunes, des locaux aussi souriant qu’accueillant…

Un peu déçus de cette région vendue comme la « Suisse du Cambodge », dont le seul point commun avec les Helvètes est le fait qu’ici, comme au Cambodge de manière générale, les prix sont élevés, comparés aux autres pays Asiatique. Est-ce du à la présence du dollar américain qui est la seconde monnaie du pays ? Aux Chinois qui construisent et privatisent à tour de bras ? Heureusement que les tarifs excessifs sont en grande part destinés aux touristes !
Et ce n’est pas à Siem Reap, où nous débarquons après 10h de bus, que la vie est moins cher… Puisque c’est ici que se trouve la « riche » histoire et LE site touristique du Cambodge, les temples d’Angkor. Beaucoup d’attentes ici, car nous avons le sentiment de plus en plus, que le Cambodge n’est connu que pour ce site ! Nous décidons de l’explorer à vélo, plus écologique, plus libre et plus économique (quoiqu’à 60 $ le pass 3 jours, rien n’est plus économique). Pour bien visiter le site d’Angkor, deux règles : éviter les heures des bus qui déversent des milliers de touristes tels des moutons, et les heures trop chaudes. Privilégiez donc les heures d’ouverture et de fermeture !

2 jours et 100 km de vélo plus tard, nous avons fait le tour : alors oui, ce site est assez grandiose, surtout quand on pense au travail que la construction de ces immenses temples a du demander à l’époque du 9ème sc. Indravarman I, roi de l’empire khnmer, entreprend des travaux d’aménagement hydraulique qui seront à la base de la prospérité de la région. Il est aussi à l’origine du premier édifice. Les années et les rois se suivent, le site prend de plus en plus d’ampleur à en devenir la capitale. Tantôt hindouiste, tantôt bouddhiste, la religion influence les constructions, avec en point commun, des escaliers hors normes voir vertigineux ! Au milieu du 15ème sc, Angkor perd son statue de capitale et de ce fait, les constructions s’arrêtent. Le site est alors enseveli sous la végétation de la jungle tropicale.

Et c’est surtout cette jungle qui magnifie les temples dont certains ont mieux résisté que d’autre à l’érosion du temps. Et à notre goût, ce sont les plus anciens qui sont les plus spectaculaires. Il s’en dégage un parfum d’authenticité, une ambiance d’aventure et ils sont surtout à l’abri des troupeaux de touristes, car moins réputés. En fin de journée, les pierres prennent des couleurs différentes au grès du coucher du soleil, certains sites semblent revivre. Sa taille impressionne, sa couleur claire dénote avec le gris des pierres et ses racines se rapprochent du serpent ou de la pieuvre suivant leur mode de propagation… le « fromager » est l’arbre symbolique des temples. Ces arbres tirent leur nom au fait que leur bois était utilisé dans la fabrication de boîtes pour les fromages. Il est aussi dit que ce serait la déformation de l’expression « forme âgée » inspirée par les reliefs du tronc évoquant des rides.

Nous retenons aussi le superbe lever de soleil sur Angkor Wat (symbole du site), même si cela nous a couté une balade cycliste bien matinale !
Les temples d’Angkor nous ont enfin offert un site d’intérêt au Cambodge, même si tout n’y est pas parfait, le tourisme de masse y est nuisant, les enfants harcèlent pour vendre tout et n’importe quoi, les prix n’ont pas de sens… mais étant inscrit au patrimoine de l’UNESCO, le site est presque propre !

6h de bus plus à l’ouest, nous débarquons dans la seconde ville du pays, Battambang. Ici nous retombons dans la partie peu attrayante du Cambodge. Même si la ville peut se targuer d’être moins sale que ses voisines, nous trouvons peu de choses à faire, à l’exception de l’observation d’une grotte d’où s’échappent tous les soirs des millions de chauve-souris. Sur fond de coucher de soleil et forêt de palmier, c’est surement une des plus belles cartes postales natures du séjour. Nous faisons pourtant preuve de bonnes volontés, nous nous sommes même allongés sur des tables de massage dans un vieux hangar, si la famille y est agréable, le massage l’est bien moins. Dans notre chambre, pas de clim, et là c’est compliqué, dehors, de jour comme de nuit, il fait entre 35 et 40°C.

Nous réussissons toutefois à nous décoller, après une semaine, mes amis Belges partent aux Philippines, et me laissent dans un bus de nuit qui file vers le sud du pays. La bonne humeur de notre trio magique aura pallié à une découverte trop sèche du nord cambodgien, sauvé des « eaux » inexistantes par le site d’Angkor.
A fond sur le visage sans pouvoir la régler, la climatisation du bus de nuit m’est fatale. Après 12h de bus, je débarque à Sihanoukville, principale ville côtière du Cambodge, et point de départ pour les fameuses « koh », îles, que les touristes s’arrachent à la recherche d’eau et d’air frais. Il est certain que ce n’est pas la ville qui te donne envie de rester, plombée par une chaleur accablante, des grues et une traditionnelle pollution. Et dire que les Chinois investissent ici pour créer, parait-il, le Las Vegas Asiatique… il y aurait déjà plus de 100 établissements où l’on joue de l’argent. A l’instar de Vegas, Sihanoukville est perdu au milieu d’un nul part très chaud !

3 îles au programme pour cette seconde semaine. Le premier bateau me dépose sur Koh Rong, où je choisis d’établir mon camp sur la plage de Coconut Beach, qui remporte les votes pour la plage la plus calme, agréable et propre. Et tout cela est bien vrai, plage de sable blanc, cocotiers, eau turquoise et très chaude et pas d’objets flottants plastifiés ! Le soir les étoiles illuminent le ciel et l’ambiance est au repos. J’arpente un petit morceau de l’île à pied, découvre quelques habitas locales perdues, et rentre le long d’autres plages, polluées et trop touristiques. Bon quand on regarde un peu derrière, Coconut Beach n’est pas non plus un modèle d’écologie, mais au moins ils ramassent les détritus.

La seconde île est celle de Koh Rong Sanloem, à 30mn en bateau plus au sud. Je débarque dans l’unique village où s’amoncellent les guesthouses et bars au bord d’une plage salle et d’une eau peu convaincante, ce qui ne dérange pas certains touristes pataugeant dans l’eau. Sur les conseils de mes amis Belges, je prends un peu de hauteur pour rejoindre une guesthouse plus à la cool (Cliff Hostel) avec une vue magnifique. Ils ne m’ont pas menti, une terrasse perchée sur falaise domine la mer et offre des couchers de soleil exceptionnels, j’en réserve pour 3 couchers ! Le coup de froid du bus de nuit conjugué aux chaleurs iliennes, me sonne une bonne journée, je suis contraint d’adopter la mode cambodgienne, chiler dans un hamac. Ici aussi on cache plus ou moins la misère, on construit à la hâte pour les touristes sans trop se soucier de l’avenir écologique du site… ce qui est déplorable, c’est que certains touristes, plus avancés sur l’environnement, ne se posent pas plus de questions que les locaux… tant qu’on peut bronzer et faire des selfies !

Je termine par la plus petite des 3 îles, celle de Koh Ta Kiev. Plus isolée du tourisme, je passe mes 3 dernières journées sur une plage où figure un seul hébergement, celui de Kactus Hostel, qui mérite d’être cité. Crée par un français et géré par une équipe jeune et internationale, le lieu est très bien incorporé dans la végétation avec des bungalows sur pilotis et une plage « presque » propre (au moins sur 50m) où l’on peut observer, la nuit, un phénomène magique : le plancton bioluminescent… quelques brasses nocturne et l’eau s’illumine autour de vous ! La noix de coco sur le gâteau, on y mange très bien, et ca faisait longtemps ! Ambiance détendue (on commence à avoir l’habitude) et au programme devinez quoi ? Et bien plage ou hamac pour chiler, et le soir, rhum et/ou fumette pour se détendre de cette dure journée ! Ici le pouce et l’index servent à tourner les pages d’un livre et non à glisser sur un écran orphelin de sa connexion WIFI… Même si on chil partout au Cambodge, c’est à Koh Ta Kiev que l’intensité maximale, sur l’échelle de Chiler, est ressentie … c’est pour dire si ca ne tremble pas beaucoup !

Voici la journée des « dernières », celle où chaque événement rapproche inéluctablement d’un « dernier » vol, celui du retour. Nous y sommes donc, à se dire bêtement que c’est le dernier tuk-tuk, les dernières chaleurs, et moins grave, le dernier fried rice ! Bêtement car il faut bien un « dernier » pour retrouver un « premier »…

Enfin je peux parler d’un tiers du trio… se livrer à un constat après seulement 2 semaines c’est court, à chacun son expérience et ses ressenties, voilà mon Cambodge : c’est celui déjà qu’il faut éviter en saison sèche, privilégier plutôt en fin de saison des pluies pour s’y sentir plus au frais et y voir plus vert. J’aime l’improvisation dans le voyage, mais le manque de sites d’intérêts et la longueur des trajets demande peut être une petite planification. Ainsi deux sites majeurs à retenir, Angkor et les îles du sud Cambodgien, vous n’êtes pas seul, les prix vous accueillent à bras ouverts et vous aurez pour fidèle compagnon le plastique. Enfin, pour vous fondre et ressentir au mieux la vie Cambodgienne, deux actes aussi simples que sources de bien être, « chilez » et « souriez »… un sourire qu’ils vous rendront et qui fait du bien dans un pays dont on l’avait ôté, il y a tout juste quelques années.
Commentaires